Supercarbon, la voiture solaire de Gérard JUMEAUX

Les principales caractéristiques de la voiture :

  • Moteur 6 kW triphasé, 5,12 m2 de panneaux solaires (504 cellules) soit 500 W/h, 122 kg de batteries classiques.
  • 3 roues en magnésium, longueur 4.96 m, largeur 1.60 m, hauteur 0.80 m, Cx 0.17, poids 220 kg.*
  • Vitesse maxi 115 km/h, autonomie illimitée sous le soleil, 3 h par temps gris, consommation 2 kW à 110 km/h.
  • Victoires en course au Danemark, en Allemagne et en Italie à Monza.

Supercarbon, la voiture solaire de Gérard JUMEAUX

Pollution ? Pénurie de carburant ? Gérard Jumeaux répond : "Supercarbon". Ce cigare profilé, posé sur trois roues et surmonté d'un panneau scintillant, est une voiture solaire. Auto Plus a essayé ce bolide aux performances "éblouissantes".

Question à mille lux : peut-on faire rouler une voiture solaire sous la pluie avenue de l'Etoile, à Joinville ? Sur le pas de son garage, Gérard Jumeaux éclate d'un rire berruréen. "Mon p'tit pote, si tu t'imagines qu'une bagnole solaire s'arrête de rouler quand il pleut, tu vas avoir une révélation !". En fait de révélation, c'est un véritable flash. Alors qu'une pluie fine s'abat sur Joinville, l'inventeur avance sa Supercarbon : fini de rire. "220kg à vide. Frein à main desserré, elle avance sous la simple poussée du vent. Tu vas voir, ça décoiffe...".

Exercice de contorsions

Mais ne monte pas à bord qui veut : au-dessus de 1,70 mètre, ça coince ! Après avoir soulevé la bulle de l'habitacle, l'apprenti solaire doit se livrer à quelques contorsions pour engager ses jambes sous le tableau de bord, jusqu'à toucher les deux pédales - accélérateur et frein - disposées dans le museau de l'engin. Assis au ras du bitume, il saisit ensuite le volant sport tendu par Gérard Jumeaux et le fixe entre ses jambes. Inutile de chercher la boîte de vitesses, il n'y en a pas ! Un contacteur à bascule avant-arrière la remplace avantageusement au tableau.

Lecture rapide des compteurs digitaux : vitesse à droite, consommation d'électricité au milieu et tours-minute du moteur en bas. Le tout est géré par un boîtier électronique situé derrière le baquet, et lui-même relié au moteur électrique.

Le monde du silence

Le détail qui tue, c'est le contact : plus de clé, mais un simple interrupteur "marche-arrêt". Contact donc. Et grand silence. On a beau y être préparé, ça fait tout drôle... Sans tambour ni trompette, la faible lumière ambiante traverse le silicium monocristallin des 504 cellules voltaïques. Ce faisant, elle déplace des électrons, qui forment un courant électrique continu. La production est de 500 watts par heure, soit l'équivalent énergétique d'un dixième de litre d'essence. Ce courant est réceptionné par des batteries classiques, qui alimentent le moteur. Celui-ci actionne enfin la roue arrière motrice par l'intermédiaire d'une courroie crantée.

Comme une flèche

Briefing de Gérard Jumeaux : "Surveille tes rétroviseurs, car la visibilité arrière n'est pas fameuse, et méfie-toi de l'accélération...". C'est parti. Les premiers tours de roue le confirment, l'accélérateur est extrêmement sensible. Puis vient le grand sprint. Waouh ! L'accélération, fulgurante, culmine à 110 km/h. Pour le spectateur, le bolide a tout de la flèche. Pour le pilote, c'est plus confus : entre les vibrations de la coque en carbone, les sifflements aérodynamiques et le bruit de roulement des pneus, mieux vaut rester concentré. Mais qu'importe le flacon... Les plus surpris sont les autres conducteurs. Il faut voir leur tête, devant ce plateau à roulettes !

Faire avancer le schmilblic

Retour au stand - pardon, au garage - après quelques tours du pâté de maisons. " Alors, c'était bien ?" questionne Gérard. Il est vrai que son physique de déménageur lui interdit de piloter son invention... Cette responsabilité échoit à Anne-Marie, épouse menue qui n'en mène pas moins "Supercarbon" avec maestria

Ordinairement, Gérard Jumeaux gagne sa vie en dirigeant des montgolfières publicitaires. La voiture solaire, c'est pour le plaisir : "Moi, je n'ai rien à vendre. Tout ce que je veux c'est améliorer la technologie voltaïque, faire avancer le schmilblick, quoi...". Voilà comment à partir de 1985. après avoir consacré sa jeunesse au side-car, dont il est champion, il a décidé de vouer ses loisirs au soleil. Loisirs coûteux au demeurant ! A titre indicatif, le seul panneau solaire coûte 100 000 F, et la voiture complète atteint les 500 000 F...

Mais il ne compte pas en rester là. L'objectif, pour 1996, c'est le "World solar challenge" d'Australie, autrement dit la coupe du monde solaire. 4 000 km dans un désert de pierres et de sable avec, pour adversaires, des universités américaines et des ingénieurs japonais... Ce rêve a un prix : 1,7 million de francs comprenant la construction d'une nouvelle voiture, la location de batteries argent-zinc, l'achat de cellules solaires AEG, le voyage et un mois de séjour sur place. A votre bon coeur !